La numérisation du secteur des assurances vie et maladie progresse à vive allure. Conséquence de ce phénomène : les processus de demande et de tarification sont désormais portés à l’attention de personnes habituellement moins concernées, telles que les actuaires, les équipes marketing et les responsables produits.
Il est difficile de blâmer les tarificateurs qui sentent leur rôle menacé, mais nombre d’approches et d’idées nouvelles émergent autour de la prise de décision et du marketing, qui présagent un renouveau prometteur pour la profession.
Une bonne décision de tarification doit correctement refléter le profil de risque individuel du demandeur. Cela est uniquement possible si la décision est fondée sur une recherche actualisée des risques et découle d’un processus décisionnel non biaisé et objectif. Le résultat obtenu est une offre qui répond au mieux aux besoins individuels du proposant. Par ailleurs, aussi négative que puisse paraître une décision de tarification, le proposant la trouvera plus acceptable si les raisons qui la justifient sont rendues transparentes.
Les procédures traditionnelles de tarification comportent inévitablement un potentiel subjectif dans la prise de décision, car des préférences individuelles entrent en jeu, qui ne reflètent pas la véritable situation de risques. Une plus grande automatisation des procédures de tarification pourrait aider à atténuer ce problème. En effet, un algorithme peut prendre des décisions dans des cas similaires en appliquant les mêmes principes, non biaisés en fonction du temps, du lieu et du contexte. Mais l’automatisation des évaluations ne veut pas dire que le rôle des tarificateurs devient superflu. Au contraire, s’ils passent moins de temps à saisir manuellement des données ou à accomplir des tâches de routine, ils peuvent être mobilisés de manière plus pertinente sur des tâches complexes.
La portée des progrès des technologies prédictives et thérapeutiques, dans le contexte de l’assurance, est immense. Aujourd’hui, beaucoup de progrès médicaux sont modelés par les applications permettant de surveiller les comportements, par les capteurs pouvant être portés sur le corps humain ou y être implantés ou encore par la chirurgie pilotée par ordinateur. Si les assurés étaient incités à utiliser ces applications afin d’améliorer l’observance thérapeutique en cas de maladies chroniques comme le diabète, par exemple, les retombées positives seraient considérables.
Ces progrès technologiques peuvent être associés à des techniques sophistiquées d’analyse des données pour une adaptation plus rapide des recommandations de tarification. En effet, dans un environnement entièrement numérique, l’expérience en matière de sinistres pourrait être traduite en continu dans les tarifications, permettant ainsi une adaptation en temps réel. Alors qu’habituellement, les recommandations de tarification sont élaborées de manière rétrospective (et donc en retard par rapport à la réalité), les analyses prédictives et les algorithmes autoapprenants pourraient aussi s’appuyer sur l’expérience, mais en y ajoutant leur dimension prédictive.
Aujourd’hui, les consommateurs sont généralement bien informés et matures et donc moins enclins à simplement accepter les décisions des assureurs. Ils connaissent mieux (ou du moins le croient) leur état de santé et leurs risques, du fait des recherches qu’ils font sur Internet ou de leur utilisation d’applications et de capteurs permettant de surveiller leur vie. Ils veulent que ces connaissances soient reflétées dans les offres de leurs assureurs. Les tarificateurs étant de plus en plus déchargés de certaines tâches de routine par l’automatisation des procédures de tarification, ils ont potentiellement plus de temps à consacrer aux interactions avec les clients et pour discuter des décisions de tarification. Cela pourrait se traduire par une amélioration de la satisfaction client et des relations avec les clients.
Un processus de demande mieux accueilli, des décisions de tarification dépourvues de subjectivité, une relation plus étroite avec les clients, une plus grande souplesse dans la conception des produits, une couverture proposée à un plus large éventail de personnes et une adaptation plus rapide aux progrès médicaux… est-ce là un si mauvais tableau ?
Certains pensent que le numérique n’est qu’une mode et espèrent qu’elle passera. D’autres placent toute leur confiance dans les réglementations, dans l’espoir que notre industrie ne soit pas trop bouleversée. Il est vrai que dans des domaines comme la protection des données et l’e-commerce, les réglementations peuvent ralentir le rythme des changements, mais elles ne peuvent en aucun cas les empêcher. L’ère numérique est partie pour durer, et ce n’est sûrement pas en l’ignorant qu’il en sera autrement.
Les compagnies d’assurance vont devoir rapidement s’adapter aux évolutions numériques, sous peine de rester à la traîne. De nombreux défis nous attendent, mais ils constituent de nouvelles opportunités pour les sociétés de demain.